Près de 300 personnes, dont de nombreuses personnalités du monde de la politique, de l’entreprise et de la communauté arménienne de France ont assisté lundi 2 décembre à la remise de la Légion d’Honneur par l’ex-Premier ministre Gabriel Attal à Franck Mourad Papazian. Une décoration venant saluer à la fois plus de quarante ans de militantisme arménien du coprésident du CCAF, membre du bureau mondial de la FRA-Dachnakstoutioun, et sa réussite professionnelle à la tête, entre autres, du groupe MédiaSchool qu’il a créé de toutes pièces.
La cérémonie s’est déroulée dans les prestigieux salons Hoche, qui avaient accueilli en 2014 le premier dîner du CCAF. Elle a notamment accueilli l’ambassadeur de France en Arménie, Olivier Decottignies et le maire de Marseille, Benoît Payan qui se sont déplacés pour l’occasion, ainsi que nombre d’élus amis de la cause arménienne, dont Luc Carvounas, Isabelle Santiago, Marie-Arlette Carlotti, François Pupponi, Bruno le Roux, René Rouquet, Patrick Karam, Audrey Pulvar, Arnaud N’Gatcha, Prisca Thévenot ainsi qu’Ishkhan Saghatelian, le représentant de la FRA en Arménie.
A noter également la présence remarquée de Jacques Séguéla, mais aussi de Yannick Bolloré, Alexandre Bompard et Antoine Arnault qui selon les termes de Franck Papazian, « font partie de cette génération de dirigeants qui m’inspirent tous les jours par leur génie et leur intelligence ». Monseigneur Krikor Khachatryan, Monseigneur Norvan Zakarian, Ara Toranian, Alain Terzian, Elise Boghossian, Armen Pétrossian, Ara et Gorune Aprikian, Frédéric Encel, Léa Salamé, Bruce Toussain, Nelson Montfort, Daniel Cazarian, Didier Parakian, Jacques Terzian, et de nombreux avocats ( Maitres Barséguian, Nioré, Hasbanian, Frangulian, Alyanakian) les présidents de l’UGAB Europe ( Nadia Gortzounian, Stéphane Pétrossian) entre autres, ont également applaudi aux beaux discours de Gabriel Attal et de Mourad Papazian dont nous reproduisons ci-dessous l’intégralité.
Discours de Gabriel Attal
Madame la ministre, chère Prisca,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Chers toutes et tous,
Et bien sûr, cher Franck Papazian,
Par où commencer ?
Oui, par où commencer, car quand on parle de toi, Franck, quand on voit tout ce que tu as accompli, tous les projets que tu conduis, tous les combats que tu mènes de front, une question nous taraude rapidement : mais d’où vient toute cette énergie ?
D’où vient toute cette force et toute cette passion ?
D’où vient toute cette envie de faire et cette rage d’agir ?
Alors par où commencer ?
Peut-être autour de la table d’un repas familial.
Là, tu entendais tes grands-parents te parler, comme une déchirure, de l’exil cruel qui les a arrachés à leur patrie.
D’un exil comme un dilemme que toutes les familles arméniennes ont en partage : quitter sa terre ou perdre la vie.
D’un exil comme blessure qui marque à jamais la diaspora arménienne : celle d’avoir dû fuir, fuir son quotidien, fuir son histoire, fuir parfois loin pour laisser la mort derrière soi.
Là auprès de ta famille, tu as vu la reconnaissance pour la République et l’amour pour la France. Le respect pour un pays qui les a accueillis et auquel ils se sont donnés corps et âme, auquel ils ont tant rendu.
Et ce n’est pas tout : là, en famille, avec tes parents, tes grands-parents, tu étais au premier rang pour voir la force, la sincérité et la puissance de l’engagement. D’un engagement politique, associatif, humanitaire.
D’un engagement total, qui coule dans votre sang.
D’un engagement pour un combat juste, mais terriblement difficile.
Celui pour la reconnaissance. Celui pour la dignité. Celui pour l’honneur d’un peuple, qu’on a tant de foi voulu effacer.
C’est sans doute dans ces heures familiales, dans cette jeunesse passée à la table des adultes, que ton caractère s’est forgé et que Mourad Papazian s’est construit.
Quant à Franck Papazian, qu’en est-il ?
Peut-être faut-il pour le comprendre revenir à ta curiosité insatiable. A ta volonté de tout savoir, tout connaître.
A ce jeune qui, dès l’âge de 13 ans, investissait tout son argent de poche, non pas pour acheter un ballon ou des bonbons, mais pour acheter la presse, tous les jours, rituellement.
Le Monde, Libération et Le Matin de Paris étaient tes bandes dessinées ou tes romans.
Tu te penchais sur l’état de notre société et du monde avec la soif de la comprendre et l’impatience d’y faire ta place.
Alors, le journalisme et la communication seront tes marques, tes passions.
Tu seras toute ta vie l’homme des paris un peu fous, auréolés de succès.
Journaliste, communicant, entrepreneur, éducateur, grand organisateur, conseil et même brièvement agent de footballeur : tu seras tout cela à la fois, car tu as mille idées à la minute, une énergie inébranlable et une volonté à toute épreuve.
Mais n’imaginons pas qu’on pourrait séparer Franck de Mourad.
Qu’il y ait en quelque sorte Docteur Franck et Mister Mourad.
Non. Tu es entier, droit, sincère. Tu es de ceux qui disent les choses et font ce qu’ils disent. Tu es de ceux qui ne renoncent pas, qui ne renoncent jamais.
C’est vrai dans le militantisme. C’est vrai dans ta vie professionnelle.
Et tout cela, je crois, vient de loin.
J’ai parlé de ta famille – et je salue tes parents présents ici.
J’ai évoqué ton enfance, de ta curiosité.
Mais s’il y a une chose qui a sans doute forgé ton caractère : c’est un accident.
Tu as 6 ans.
L’âge où l’on apprend à lire et à écrire.
L’âge où tout devrait être jeu et insouciance.
Pour toi, malheureusement, ce fut l’âge des blessures.
8 jours dans le coma. Un réveil miraculeux.
Mais ce diagnostic qui tombe. Ce diagnostic lourd des médecins qui disent à tes parents que rien ne sera plus jamais comme avant. Que tu ne retrouveras probablement jamais l’usage de toute une moitié droite de ton corps. Qu’il faut s’attendre à une vie de handicap lourd, irréversible.
Ils avaient raison sur un point : rien ne serait plus jamais comme avant. Mais ils ne te connaissaient pas. Ils ne connaissaient pas cette force de caractère, dont tu as fait montre dès cet âge.
Tu t’accroches, sans cesse.
Ce sont les séances de kiné, deux fois par jour, des mois et des mois.
Ce sont deux ans loin de l’école, pour faire ta rééducation.
C’est cette réponse claire : « non », quand on te dit de tenir ton stylo avec la main gauche, car on pensait que tu n’arriverais jamais à écrire de la droite. Déjà, tu refusais de céder à la fatalité, et aujourd’hui, tu es droitier.
Au fond, tu avais une certitude, une conviction : cet accident t’avait peut-être volé une grande part de ton enfance, mais il ne te volerait pas ta vie.
Tu te bats et tu réussis. Tu te relèves. Tu retrouves tes facultés.
Et quand on a gagné ce combat dès l’enfance, on est prêt à livrer tous les autres.
Quand on a gagné ce combat dès l’enfance, on n’a plus peur de rien. On a juste la rage de vivre.
Alors, tu es l’homme des paris les plus fous.
Après quelques années chez Accor, Publicis et RTL, tu apprends qu’une petite école de communication et de journalisme est en train de déposer le bilan à Levallois.
Toi qui as toujours eu soif de transmettre et d’agir : tu sautes le pas, et tu achètes l’école.
Tes proches ouvrent des yeux ronds. Qu’à cela ne tienne : en 5 ans, le succès est au rendez-vous et le nombre d’élèves a été multiplié par 10.
Puis c’est une grande épopée qui commence.
Les écoles ouvrent, de plus en plus nombreuses, au gré des rencontres et des opportunités.
Très vite, c’est un véritable groupe qui se forge.
Il y avait une cinquantaine d’étudiants en 2002. Aujourd’hui, Mediaschool, c’est 10 000 étudiants. C’est 25 campus, 17 villes, 3 pays.
Aujourd’hui, ce sont des formations dans tous les secteurs d’avenir : le luxe, le sport, l’écologie, le digital. Car tu as su anticiper et prendre tous les tournants de notre société.
Aujourd’hui, Mediaschool, que tu mènes avec Kal Ladha, ce sont plus de 30 000 anciens qui ont appris, qui ont été formés grâce à toi.
Oui, c’est une chose dont tu peux être fier.
Une chose qui, à elle seule, justifie la décoration que je m’apprête à te remettre : tu as changé la vie de ces jeunes. Tu leur as offert une formation, une voie, un avenir. Et tu n’as rechigné devant aucun effort, aucune initiative, aucune rencontre pour leur offrir le meilleur.
Mais tu ne t’arrêtes pas là. Tu rachètes CB News, Stratégies, puis le Journal du Luxe, magazines de référence pour les professionnels du marketing, de la communication et du luxe.
C’est une manière d’écrire sur ces métiers qui te passionnent depuis toujours.
C’est aussi une vision d’ensemble. De ce que tu peux apporter à tes étudiants, en leur proposant des débouchés et une formation pratique dans les magazines de ton groupe.
Mais tu ne t’arrêtes pas là.
Tu aimes les défis.
Toi, le fan du PSG, tu décides de devenir agent de footballeur et tu pars même en Argentine pour signer des joueurs. Tu découvres que le milieu n’est pas forcément celui que tu imaginais, et tu reviens en France, mettant de côté ce projet – pour le moment en tous cas !
Mais surtout, quand tu t’empares d’un défi : tu le relèves et tu le réussis. Et je pense notamment à la dernière aventure dans laquelle tu t’es lancée : le Who’s Who.
Ce que tu préfères, c’est l’humain. Ce sont les rencontres. Les liens qui se nouent et permettent aux idées de se concrétiser.
Alors, le Who’s Who, c’est bien plus qu’une bible rouge, où les biographies s’enchaînent en petits caractères. Avec toi, le Who’s Who, c’est la célébration de la réussite à la Française. C’est la capacité à toucher, à lier, à mettre en contact. Ce sont autant d’opportunités à naître et de projets à venir.
Quand tu prends le Who’s Who en main, c’est une belle endormie. Tu décides de la dépoussiérer, d’en faire plus qu’un livre, une institution vivante avec des événements, des rencontres, des prix.
Avec toi, le Who’s Who prend vie et nous offre ce dont nous avons besoin, tant besoin : une dose d’envie et d’optimisme. Une dose de confiance en notre pays, et en celles et ceux qui le font vivre.
Mais bien sûr, cher Franck, cette détermination que tu as eue dans ta vie professionnelle, c’est celle aussi que chacun connaît dans ta vie militante.
C’est à travers celle-ci que nous avons eu l’occasion de nous connaître.
J’étais un jeune député, tout juste élu dans les Hauts-de-Seine.
J’étais un jeune député et je ne connaissais pas bien encore l’histoire et la volonté du peuple arménien.
Alors, j’ai appris – beaucoup. Je me suis passionné – totalement.
Nous avons partagé des dîners, des voyages. Dont un voyage en Arménie avec le Président de la République, que nous ne sommes pas près d’oublier.
Le Président de la République qui m’avait même donné un surnom à cette occasion : celui d’Attalian. Et je n’ai pas peur de le dire : ce surnom, pour moi, c’est la plus belle des décorations !
Et je crois que si j’ai appris tant sur la communauté arménienne. Si j’ai décidé de me donner, autant que je le pouvais, dans toutes mes fonctions, pour la défendre : c’est notamment grâce à toi.
Parce que moi aussi, comme beaucoup ici, j’ai pu voir aux premières loges ce que c’était que la force de conviction de Mourad Papazian !
Et je ne le regrette pas un instant !
Tu es, comme le disait Aznavour, 100% Français et 100% Arménien.
Un républicain passionné, amoureux de son pays et un Arménien entier, sincère, amoureux de sa terre.
Alors, dans les traces de tes parents et grands-parents, tu t’engages.
Tu entres à la FRA. Tu en deviens directeur du mouvement de jeunesse et rédacteur en chef du journal. C’est à ce poste, notamment, que tu coordonneras de nombreuses actions, en lien avec la Croix Bleue en faveur des victimes du tremblement de terre terrible, qui a touché l’Arménie.
Mais le mouvement arménien souffre encore d’un mal : la division.
La division qui l’empêche de porter ses combats face à la Turquie puissante et l’Adzerbaïdjan riche.
Alors, quand le triste anniversaire des 80 ans du génocide approche, tu fais partie de ceux qui s’engage pour l’unité dans le comité du 24 avril.
Autour d’une cause : la mémoire. Et d’une promesse : la reconnaissance du génocide, tu aides à poser les fondations de ce qui deviendra le CCAF.
Mais surtout, tu participes à donner au mouvement arménien l’ampleur et la résonnance dont il a tant manqué.
Tu as un ennemi, c’est la distance.
La distance qui nous sépare de l’Arménie. La distance du temps qui passe.
Mais le combat pour la reconnaissance du génocide, c’est le combat de ta vie.
C’est un combat pour la Justice.
C’est un combat pour un peuple, qu’on a voulu anéantir.
C’est un combat pour ta famille, pour tes grands-parents, pour toutes celles et ceux, déracinés, qui ont dû fuir le génocide.
Alors, tu te bats. Tu te bats pour obtenir une reconnaissance par l’Etat. Tu n’économises ni ton énergie ni tes heures. Tu multiplies les rendez-vous, les contacts. Tu ravives la flamme de l’espoir et, en 2001, quand la France reconnaît enfin le génocide dans la loi, c’est en grande partie grâce à toi.
Mais nous le savons tous ici, tu n’es pas homme à te contenter d’une victoire.
Tu vas agir pour les Arméniens, toujours et tout le temps. Tu ne renonces jamais. Tu ne baisses jamais les armes.
Tu t’engages dans le combat pour la pénalisation du négationnisme du génocide arménien.
Par deux fois, tu réussis à faire voter un texte. Mais par deux fois, ce texte est censuré par le Conseil constitutionnel.
Je sais que ce dernier obstacle reste comme une blessure. Reste comme une souffrance pour la communauté arménienne.
Et je veux vous le dire : aussi longtemps que je le pourrai, je mènerais ce combat avec vous. Aussi longtemps qu’il le faudra, je serai à vos côtés pour trouver une solution et obtenir la pénalisation de la négation du génocide arménien.
A la tête du CCAF depuis 12 ans avec Ara Toranian, que je salue, tu as fait ce que tu as fait avec toutes les organisations dont tu as pris les rênes.
Tu as réformé, changé, innové.
Tu as porté l’influence du CCAF au plus haut niveau, créé le dîner du CCAF aujourd’hui incontournable.
Et tu ne recules devant rien ni personne.
Tu ne recules jamais quand il s’agit de combattre l’injustice.
Tu ne recules jamais quand il s’agit de défendre ton peuple.
Tu l’as montré en ne cédant pas une seconde aux intimidations de la Turquie.
Elles ont été nombreuses. Tu as été suivi. Tes locaux cambriolés. Ta voiture a été enlevée pour réapparaître mystérieusement quelques jours plus tard.
Cela ne t’a jamais fait reculer, parce que le courage est une seconde nature chez toi.
Tu n’as baissé ni la tête ni le ton. Tu as même écrit un livre, « Le Régime Erdogan », dont on te disait qu’il serait ton arrêt de mort.
Mais cela n’a rien changé à ta détermination. Et je suis fier d’avoir été le Porte-Parole du Gouvernement, qui a pu annoncer, du pupitre du compte-rendu du conseil des ministres, la dissolution des Loups Gris.
Tu as montré ta volonté et ton courage, ces dernières années encore, en ne cessant de porter le combat pour le Haut-Karabagh et pour le retour des familles arméniennes chassées par l’Azerbaïdjan.
En mars dernier, j’ai eu l’honneur de m’exprimer devant le dîner du CCAF, et de rappeler, en tant que Premier ministre, le soutien indéfectible de la France.
Aujourd’hui, c’est plus librement encore que je peux dire les choses.
Notre soutien à l’Arménie doit être total.
Total, parce que les destins de nos deux pays sont liés.
Total, parce que, comme dans un balbutiement insupportable de l’Histoire, un peuple souffre de vouloir vivre libre sur sa terre.
Total, parce que nous ne devons rien céder à l’autoritarisme et à la loi du plus fort.
Un soutien pour le retour des otages, pour les déplacés, pour le respect de l’intégrité territoriale de l’Arménie.
Un soutien humanitaire, aussi, économique, financier, culturel.
La France et l’Arménie sont des Nations sœurs.
Liées par la musique et les lettres.
Liées par des valeurs et par la soif de liberté.
Liées par l’Histoire, à jamais.
Comptez sur moi, comme vous pouvez compter sur Mourad Papazian pour défendre avec toujours plus de force et de courage le peuple arménien.
Cher Mourad, ton engagement est celui d’un homme libre pour un peuple libre.
Il m’impressionne. Il nous impressionne. Il nous oblige et nous inspire le plus grand respect.
Pour la cause arménienne, tu as soulevé des montagnes.
Parce que rien ne t’arrête.
Parce que tu as l’engagement dans la peau.
Parce que plus les obstacles sont grands, plus tu as envie de les relever.
Parce que des femmes et des hommes comptent sur toi et que l’injustice t’est insupportable.
Tu es un homme entier – tu ne peux pas être autrement.
Entier dans ta vie professionnelle.
Entier dans ton engagement militant.
Entier dans ta vie de famille, avec tes parents, avec ton épouse, Azniv, ton fils Azad et ta fille Charig, dont tu es si fier et que tu aimes plus que tout.
Tu ne baisses jamais les bras. Tu mènes mille vies et mille projets à la fois – mais tu les mènes pleinement.
Cher Franck,
Quelques mois après le début du Génocide, s’exprimant à La Sorbonne, Anatole France avait dit du peuple arménien qu’il aimait tant : « un peuple qui ne veut pas mourir est un peuple qui ne meurt pas ».
Cette citation te va bien.
Toi qui as affronté les drames et en a tiré la force, le courage et la détermination.
Toi qui te bats pour le peuple Arménien, au quotidien, et refuses de le voir affaibli ou diminué.
Toi qui sais que l’Arménie se relève toujours, et qui seras toujours là jusqu’à ton dernier souffle pour l’y aider.
Alors parce que tu incarnes le courage et l’engagement,
Parce que tu as fait avancer la société et que tu défends un peuple frère,
Parce que tu as aidé à former des milliers de jeunes,
la République t’est infiniment reconnaissante et je suis fier de te faire, cher Franck, dans quelques instants, chevalier de la Légion d’Honneur.
Discours de Franck Mourad Papazian
Monsieur le Premier Ministre, cher Gabriel Attal,
Mesdames et messieurs les ministres,
Monsieur l’Ambassadeur de France en Arménie
Messeigneurs,
Chers amis,
Chère famille,
Merci, Merci d’être là !
C’est avec une immense émotion et une profonde gratitude que je prends la parole aujourd’hui. Recevoir la Légion d’honneur, cette prestigieuse distinction de la République française, est un honneur, c’est un immense moment d’émotion qui dépasse ma seule personne.
Je voudrais commencer en vous parlant de mes grands-parents. Ils ont fui le génocide arménien, cette tragédie indicible qui a laissé des blessures ineffaçables sur tout un peuple. La France, cette terre de liberté et d’humanité, les a accueillis. Ils sont arrivés ici avec presque rien, sinon une volonté farouche de reconstruire leur vie et de protéger l’héritage culturel et spirituel qu’ils portaient en eux. Grâce à la République française, mes grands-parents ont pu offrir à leurs enfants, mes parents, et à nous, ma sœur et moi, leurs petits-enfants, la chance de rêver et de construire un avenir. Ils ont fui le génocide arménien perpétré par le gouvernement turc, qui près de 110 ans après le crime n’a toujours pas été reconnu par ses auteurs.
Ils sont arrivés en France avec le respect de cette patrie d’accueil et avec la volonté d’une intégration réussie et d’une loyauté exemplaire.
Permettez- moi de revenir aux racines de mon parcours, à cette enfance qui a forgé mes valeurs. Je suis né dans un foyer modeste, mais riche d’amour, d’éducation et d’une foi inébranlable en l’avenir.
Mes parents, Odette et Henri, que je considère comme mes premiers héros, m’ont transmis une double richesse :
– celle d’une identité franco-arménienne forte marquée par une histoire de résilience et
– celles des valeurs universelles que sont le respect, la dignité et le travail.
Très tôt, à l’âge de 6 ans, j’ai été frappé par un terrible accident dont je garde encore des traces aujourd’hui. Plongé dans un coma profond, durant 8 jours, j’en suis ressorti avec une lourde hémiplégie qui m’a handicapé de nombreuses années.
Mais je me suis battu, vraiment, et il aura fallu beaucoup de soutien de la part de mes formidables parents et de ma sœur pour relever ce premier défi de la vie.
Un neurologue que j’ai revu récemment était stupéfait par ma récupération. Il me disait que dans ce type de situation, on perd 50% de ses facultés intellectuelles. Je lui ai répondu que cela avait été le cas…
Je me souviens des longues soirées où mon père racontait l’histoire du peuple arménien, cette histoire marquée par les épreuves mais aussi par une capacité à se relever et à construire. « Les racines profondes résistent à toutes les tempêtes » disait-il souvent. « Les racines profondes résistent à toutes les tempêtes.» Ces paroles ont guidé mes pas à chaque étape de ma vie.
« Vous devez toujours vous rappeler que vous êtes l’héritier d’un peuple de survivants. Cela vous oblige à vivre avec dignité » disait Romain Gary
Ces mots résonnent profondément en moi. C’est avec ce mantra que j’ai bâti ma vie.
Je voudrai écrire un livre sur mes parents tant ils ont été admirables, j’ai tant de choses à dire sur eux, et je l’intitulerai « la gloire de mon père et le château de ma mère. » Les engagements de mon père et les sacrifices de ma mère. Dans une très belle complémentarité, ils m’ont tout appris, tout donné, sans jamais s’apitoyer sur mon sort d’enfant accidenté. Ils ont été un exemple pour moi. Ils ont été parfaits. Je les aime tant et c’est l’occasion de leur rendre hommage aujourd’hui.
La fidélité à mes racines m’a guidé tout au long de ma vie.
Mon engagement pour l’Arménie et la cause arménienne n’a jamais faibli. Je crois profondément qu’il est de notre responsabilité, à nous, descendants de survivants, de faire entendre la voix de ceux qui ne peuvent plus parler.
La mémoire ne doit jamais être un fardeau, mais une lumière qui éclaire nos chemins.
Très tôt, j’ai compris que mon destin ne pouvait être séparé de celui des autres. S’engager pour les causes qui me tenaient à cœur, et en particulier pour l’Arménie, était une évidence. Dans un monde en mutation, où l’individualisme semble parfois primer, j’ai voulu porter haut les valeurs de solidarité et de justice.
Chaque action que j’ai menée pour l’Arménie, je l’ai accomplie en pensant aux générations futures.
C’est une dette de gratitude envers mes aînés, mais aussi une promesse faite à mes enfants et à ceux qui viendront après eux.
L’histoire des Arméniens est jalonnée de crimes contre l’humanité, de génocide, de déportations. Les Arméniens ont vécu le premier génocide du 20ème siècle et la première épuration ethnique du 21ème siècle puisqu’il y a un peu plus d’un an, 120 000 Arméniens du Haut-Karabakh ont subi une guerre violente de la part de l’Azerbaïdjan et une déportation… Ils ont dû quitter leur pays, la terre de leurs ancêtres… Sans que le monde bouge… Pire, l’ONU a confié à l’Azerbaïdjan le soin d’organiser la COP 29, alors que 23 otages sont encore et toujours dans les prisons de Bakou, dont 8 de mes amis.
Ce combat est, vous l’avez compris, difficile mais nous avons pu compter sur le soutien sans faille de la France, de l’ensemble des forces politiques, des Présidents de la République qui se sont succédé et particulièrement de Gabriel Attal qui a toujours été présent à nos côtés, je le remercie infiniment et je veux lui témoigner de ma confiance et de mon affection.
Je veux aussi saluer les soutiens de toujours, à qui je tiens tant, qui se sont investis à nos côté avec convictions et qui sont là aujourd’hui, Luc Carvounas, Isabelle Santiago, Benoit Payan, Marie-Arlette Carlotti, François Pupponi, Bruno le Roux, René Rouquet, Patrick Karam, Audrey Pulvar, Arnaud N’Gatcha, Prisca Thévenot… Un clin d’œil à Danièle Cazarian et Didier Parakian. Merci.
Nous sommes nombreux à être mobilisés dans ce combat, je ne peux hélas saluer un par un les camarades présents, les compagnons de route, mais je veux en citer trois qui les représenteront tous, Ara Toranian avec qui je co-préside le Conseil de Coordination des Organisations Arménienne de France. Je veux le remercier pour la qualité et l’intensité de son engagement, face à l’adversité. Ensemble, nous avons été de tous les combats. Hovsep der Kevorkian avec qui je suis au bureau mondial de la FRA et Ishkhan Saghatelian, le représentant de la FRA en Arménie, que je remercie d’avoir fait le déplacement. A tous les deux, un clin d’œil suffit pour nous comprendre. Nous partageons tant ensemble.
Je veux penser aussi à toutes ces femmes et ses hommes qui agissent dans l’humanitaire, l’éducation, la culture, la communication et les médias et qui sont là ce soir.
La transmission a toujours été un moteur. Elle m’a naturellement conduit à m’investir dans le monde de l’éducation avec la création de MediaSchool il y a plus de vingt ans.
Créer des écoles, les implanter partout en France a été pour moi la satisfaction d’une vie. Permettre à des dizaines de milliers de jeunes de se former pour vivre leur passion et préparer leur vie professionnelle. L’éducation est, à mes yeux, le levier le plus puissant pour changer le monde. J’ai eu la chance de diriger et de participer à des projets éducatifs ambitieux, visant à transmettre non seulement des connaissances, mais aussi des valeurs.
Dans le domaine des médias, avec CB News, Stratégies, le Journal du Luxe et le Who’s Who, mon dernier amour, mon objectif a toujours été de créer des espaces de dialogue, de réflexion et d’apprentissage.
Les médias ont le pouvoir de connecter, de rassembler, et même de guérir. Dans un monde où les fractures sociales et culturelles semblent parfois s’élargir, j’ai voulu, à mon échelle, contribuer à bâtir des ponts.
Je ne serais jamais arrivé là où je suis aujourd’hui sans l’aide, le soutien et la confiance de tant de personnes. Car, comme le disait Antoine de Saint-Exupéry : « La grandeur d’un métier est peut-être avant tout d’unir les hommes. »
À travers l’éducation et les médias, j’ai voulu unir, inspirer et transmettre. Mais cette réussite n’est pas la mienne seule.
Elle est celle de mes collaborateurs, de mes mentors, et de tous ceux qui m’ont accompagné. « On ne réussit jamais seul », écrivait Paul Valéry, et ces mots n’ont jamais été aussi vrais.
Dans ma vie professionnelle, j’ai eu la chance de rencontrer des personnes extraordinaires. J’ai appris qu’être un leader, ce n’est pas imposer une vision mais la construire ensemble.
Mes succès, si succès il y a, sont ceux d’une équipe, d’un collectif.
Là encore, je ne peux pas citer toutes les personnes que j’admire tant et qui sont présentes ce soir mais je ne peux pas ne pas citer Jacques Séguéla qui est notre mentor à tous et qui a marqué la communication de son empreinte. Je veux saluer et rendre hommage à Yannick Bolloré, Alexandre Bompard et Antoine Arnault qui font partie de cette génération de dirigeants qui m’inspirent tous les jours par leur génie et leur intelligence. Merci d’être là !
Je veux saluer Teddy Riner, qui nous impressionne depuis tant d’années et avec qui j’ai la chance d’être associé. Merci cher Teddy de ta présence. Tu as fait rêver toute la France cet été !
La France ! Je voudrais m’arrêter un instant pour exprimer ma gratitude à la France. Ce pays, qui a accueilli mes grands-parents, a permis à ma famille de trouver refuge, mais aussi de s’épanouir, d’apprendre, de rêver.
Je suis fier d’être Français, tout autant que je suis fier de mes racines arméniennes. Ces deux identités cohabitent en moi, non pas comme une dualité, mais comme une richesse.
Je pense souvent à la formule employée par Charles Aznavour, qui nous manque tant qui disait « nous sommes 100% français et 100% arméniens. » Mais j’ai beaucoup médité aussi sur la conviction de Thomas Jefferson qui disait :« Tout homme a deux patries, la sienne et la France. »
Aujourd’hui, en recevant cette Légion d’Honneur, je ressens une immense fierté, mais aussi une grande humilité.
Cette distinction ne m’appartient pas entièrement.
Elle appartient à ma famille, à mes amis, à mes collaborateurs qui ont cru en mes projets, qui m’ont soutenu et qui s’engagent à mes côtés. Je ne peux m’empêcher de citer John Donne qui disait « aucun homme n’est une île ». Cette phrase nous rappelle que notre destinée est collective. Elle me rappelle que ce que je reçois aujourd’hui est le fruit d’une multitude de mains tendues, de cœurs ouverts et d’intelligences partagées.
Ce moment est aussi une promesse.
Une promesse de continuer à servir.
Une promesse de ne jamais oublier que le privilège d’être reconnu s’accompagne du devoir de transmettre.
J’espère que cette reconnaissance sera une inspiration pour d’autres, tout comme j’ai été inspiré par ceux qui m’ont précédé.
Je pense aussi à mes enfants, Azad et Charig, qui sont la prunelle de mes yeux et à qui je veux transmettre cette conviction: il faut toujours croire en la force de l’éducation, de l’engagement et de la mémoire. Apprendre, penser aux autres et ne pas oublier.
Et surtout, ne jamais rien lâcher !
Je veux remercier mon épouse Azniv qui est là à mes côtés qui supporte les multiples facettes de ma vie tout en me soutenant et je sais que ça n’est pas toujours facile. Je sais qu’à mes côtés, la vie n’est pas un long fleuve tranquille.
Une pensée évidemment pour ma sœur Maral, ma nièce et mon neveu, Endza et Sevag que je regarde grandir avec attention. Ils sont tous les trois au centre de notre vie.
Je remercie chacun d’entre vous pour votre présence, votre soutien et votre amitié. J’ai tellement envie de vous citer un par un, tant je suis heureux, fier et flatté que vous ayez répondu à cette invitation. Mais vraiment !
Je remercie la République française pour cet immense honneur.
Je remercie Gabriel Attal pour avoir accepté d’être le prestigieux remettant.
Et je remercie la vie, qui, malgré ses épreuves, me permet de réaliser mes rêves.
Merci !
https://www.armenews.com/gabriel-attal-remet-la-legion-dhonneur-a-franck-mourad-papazian-2/
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