Dans sa reconquête, l’armée azerbaïdjanaise trouve sur son chemin des villes fantômes, des sillons labourés par les obus, des cimetières saccagés et de multiples mines.
Par Paul Tavignot
Une lourde odeur de décomposition monte de la végétation, au pied des ruines. La façade occidentale d’une église se dresse encore de toute sa hauteur, sans doute le pan de mur le plus élevé de tout le quartier. L’ouverture ronde proche du faîte devait être autrefois occupée par une rosace. Mais personne ne sait au juste à quel culte était voué ce temple, ni même son nom, parce que plus personne ne vit à Fizouli depuis le 23 août 1993. Le jour où la ville, qui comptait 17 000 habitants au dernier recensement soviétique de 1989, a été prise par les forces arméniennes du Haut-Karabakh. Ses derniers habitants, majoritairement azerbaïdjanais, qui avaient déjà enduré une semaine de bombardements intenses, en ont été chassés. « Regardez toute cette destruction, ces fosses creusées par les bombes aériennes. Il ne reste que des ruines. Mais pourquoi nous ont-ils chassés d’ici, si c’est pour tout laisser à l’abandon ? », déclare Natik, un jeune officier azerbaïdjanais.
La ville est repassée sous le contrôle de Bakou à la mi-octobre, au terme de combats acharnés. Des caisses de munitions pleines s’entassent au coin des rues. Des obus de mortier et surtout des 122 mm pour l’obusier soviétique D-30, très utilisé par les Arméniens. En ce samedi 7 novembre, on les entend encore tonner 10 km à 20 km au nord, où les combats font rage aux abords de Khodjavend, ainsi qu’au nord-ouest, à 40 km, où Choucha (« Chouchi », pour les Arméniens) tombera, quelques jours plus tard. Depuis la reprise de la cité, l’Arménie défaite et l’Azerbaïdjan victorieux ont signé un cessez-le-feu, sous l’égide de la Russie.
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