Mardi 30 avril, Mgr Aram Atéshian, vicaire général du Patriarcat arménien de Constantinople, a remis au gouverneur d’Istanbul la demande d’autorisation de procéder à l’élection du 85e patriarche de l’Église arménienne de Turquie.
Claire Lesegretain
Près de deux mois après la mort, le 8 mars, de l’ancien patriarche Mesrob II Moutafian – qui occupait le poste de patriarche depuis 1998 –, le Conseil ecclésial du Patriarcat arménien de Constantinople s’est réuni à Istanbul (Turquie) lundi 29 avril, afin de décider l’organisation des élections du futur patriarche.
Selon le désir du gouvernement, l’archevêque Aram Atéchian, vicaire général du Patriarcat arménien de Constantinople, a été nommé président de la commission d’organisation de ces élections à laquelle il est également candidat.
Le lendemain, mardi 30 avril, Mgr Aram Atéshian et Mgr Sahag Machalian, président du synode de l’Église arménienne, ont été reçus par le gouverneur d’Istanbul, Ali Yerlikaya, pour lui remettre la demande d’autorisation de procéder à l’élection du 85e patriarche de l’Église arménienne de Turquie.
Ce processus d’élection d’un nouveau patriarche est en fait le second entamé par l’Église arménienne de Constantinople. En effet, en 2017 déjà, le Conseil du Patriarcat avait décidé de commencer la procédure de la tenue des élections du nouveau patriarche et l’archevêque Karekin Bekjian, alors primat des Arméniens d’Allemagne, avait été élu locum tenens pour superviser le processus électoral.
Intervention brutale des autorités turques
Mais, après quelques mois de préparatifs, les autorités turques étaient intervenues brutalement en refusant de reconnaître l’élection de Mgr Karékin Bekjian. En février 2018, le conseil ecclésial du Patriarcat arménien s’était réuni et, conformément aux ordres du pouvoir, avait rétabli Mgr Atéshian dans ses fonctions de vicaire général.
Mgr Aram Atéshian, qui est le candidat du gouvernement turc, fait fonction de patriarche par intérim depuis 2008, pour suppléer Mesrop II Moutafian, tombé malade peu après son élection et resté longtemps hospitalisé à l’hôpital Saint-Sauveur d’Istanbul.
Depuis cette date, la communauté arménienne avait adressé plusieurs demandes aux autorités turques pour la tenue des élections mais toutes avaient été rejetées. Un refus expliqué par la disposition de la Constitution de 1863, selon laquelle la tenue des élections du Patriarche ne pourrait se faire qu’après son décès.
Désormais, la période de deuil officielle de Mesrob II étant terminée, le processus peut être lancé. Mais celui-ci « sera vraisemblablement long et complexe au regard des positions antagonistes des factions qui s’opposent », prévient Philippe Sukiasyan, diacre de l’Église arménienne en France.
Environ 80 000 fidèles
La communauté arménienne de Turquie d’environ 80 000 fidèles est, en effet, partagée entre « loyalistes » – conservateurs proches de l’AKP d’Erdogan – et « progressistes » – du mouvement Nor Zartonk (Nouvelle Renaissance), du député (HDP, dans l’opposition) Garo Paylan.
« On repart de zéro et l’inquiétude vient que, à chaque élection, les règles sont remaniées », poursuit Philippe Sukiasyan. De fait, nul ne sait aujourd’hui comment sera composée l’assemblée qui élira le patriarche. En plus des 9 membres (religieux) du synode, cette assemblée doit compter aussi des laïcs. « Qui seront ces laïcs puisque les conseils paroissiaux, depuis des années, ne sont pas autorisés à refaire des élections ? », interroge le diacre Sukiasyan.
Les conditions pour être autorisé à être candidat peuvent, elles aussi, être modifiées par le gouvernement. « Normalement, il faut être de nationalité turque, être né en Turquie et avoir fait son service militaire en Turquie, mais le gouvernement va sûrement chercher à empêcher la candidature de Mgr Bekjian », estime Philippe Sukiasyan.
Quoi qu’il en soit, les Arméniens de Turquie attendent maintenant l’autorisation du ministère de l’intérieur turc.
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